Le Cirrus SR22 N565CK décolle d'Oyonnax en fin d'après-midi pour rejoindre Auxerre-Branches sous plan de vol VFR de nuit. À l'arrivée, la brume se forme rapidement, la visibilité tombe sous le kilomètre et la nuit est noire, sans lune. Le pilote s'annonce en finale pour la piste 36 avant de perdre les références visuelles. L'avion s'écrase deux kilomètres avant le terrain et prend feu. Pilote décédé, appareil détruit.
Le pilote du Cirrus SR22 N565CK décolle d'Oyonnax pour rejoindre son terrain d’attache à Auxerre. Il détient bien la qualification de vol de nuit, obtenue quatorze ans plus tôt, mais depuis, il n'a plus effectué le moindre vol dans l’obscurité. Ce soir d'hiver, il entreprend un vol qu'il pense simple et familier. Pourtant, sans pratique récente, la perception nocturne, le repérage visuel et la lecture des instruments deviennent vite approximatifs.
Le vol de nuit n’est pas une compétence théorique : c’est une habitude sensorielle qui s'oublie vite.
Au départ, la météo paraît correcte, mais la situation se dégrade rapidement à l'arrivée. La visibilité passe de cinq kilomètres à moins d'un kilomètre, tandis que la brume s'installe sur le terrain. L'agent AFIS d’Auxerre lui signale "brume à 100 ft sol", ciel invisible, balisage allumé au maximum. Le pilote poursuit malgré tout. En vol, il croit encore distinguer le sol.
C'est une illusion classique : le brouillard se forme d’abord sous la couche, et les lumières au sol paraissent normales jusqu'à ce que la visibilité tombe à zéro.
Dans la brume, les lumières se diffusent et effacent toute perception de profondeur. L'horizon disparaît, les contours s'effacent, et le pilote croit "voir" la piste alors qu'il ne perçoit qu'un halo lumineux sans relief. Il s'annonce à la verticale, puis en vent arrière et en finale, persuadé d’être aligné.
En réalité, il vole sans repères visuels fiables. Quelques instants plus tard, l'avion entame un virage descendant et heurte le sol deux kilomètres avant le terrain.
La désorientation spatiale agit sans prévenir : dix secondes suffisent pour perdre l’équilibre sensoriel.
Quand les repères extérieurs disparaissent, seul le tableau de bord peut sauver le vol. Mais encore faut-il savoir s'y fier et interpréter correctement ce qu'on voit. Le pilote du SR22 n'était pas qualifié IFR et n'avait plus pratiqué le vol aux instruments depuis longtemps.
En nuit noire et dans la brume, le corps envoie de faux signaux, le cerveau y croit, et la main suit. Sans entraînement, cette transition brutale vers le pilotage "tout instruments" devient presque impossible à gérer.
L'enquête n’a pas permis d’établir si le pilote avait consulté les prévisions détaillées. Pourtant, la carte TEMSI indiquait déjà un risque fort de brume et de brouillard en soirée.
Ce type de situation demande une préparation spécifique : heure limite d'arrivée, terrains de déroutement, marges météo et plan B clair. De nuit, la météo doit être considérée non pas comme "bonne ou mauvaise", mais comme évolutive et potentiellement piégeuse dès qu’il y a humidité et vent faible.
Deux jours avant l’accident, le même pilote avait déjà tenté d’atterrir à Auxerre sans succès à cause du brouillard. Ce soir-là, il voulait simplement ramener son avion.
Cette motivation légitime et humaine est un piège fréquent : la fatigue, la frustration d’un précédent déroutement, et la familiarité du terrain font baisser la vigilance. On croit connaître, on croit gérer. En réalité, on s’éloigne de la marge.
Le plus difficile n’est pas de piloter, mais de savoir renoncer avant d'être piégé.
Le radar montre une trajectoire régulière jusqu’à la verticale du terrain, puis un virage gauche descendant avant l’impact.
Aucun appel radio, aucune anomalie technique : juste un basculement progressif, silencieux.
En nuit sombre, sans horizon ni référence, l’équilibre intérieur se dérègle.
Ce phénomène n’épargne personne : seule une pratique instrumentale récente permet d’y résister. Sans elle, le corps gagne, et l’avion descend.
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